Parution : 21/06/2018
ISBN : 9782360545865
240 pages (148x210)

20.00 €

Smile

La symphonie inachevée des Beach Boys

On dit souvent que Sgt. Pepper’s des Beatles est l’album rock le plus influent de tous les temps. Ce livre est l’histoire de l’album qui aurait pu le supplanter.
En 1966, le leader des Beach Boys Brian Wilson, qui vient de révolutionner la pop avec le single « Good Vibrations », fantasme Smile, une « symphonie adolescente adressée à Dieu », une saga mêlant l’histoire de l’Amérique à l’exploration du cycle de la vie et des éléments. Sa quête échoue dans une frénésie de drogues, de rivalités et de rêves inaboutis, sur fond de magie noire et de mauvaises vibrations : Smile est mort mais va constamment ressusciter pendant un demi-siècle, distillé sur d’autres albums, réinterprété en concert, compilé sur un coffret de sessions. Il fascine des générations de journalistes, devenant un des trésors cachés de la presse rock naissante. Il circule sous le manteau, en cassette ou en MP3 et des fans entreprennent de le parachever. Son créateur le réenregistre lui-même, en 2004, avant qu’il ne finisse par sortir officiellement en 2011. Smile nous raconte l’histoire de Brian Wilson, des Beach Boys, de la pop, mais il parle aussi de notre rapport à la musique et de notre quête de l’inaccessible. Jean-Marie Pottier explore cette saga foisonnante à l’aide des archives de l’époque et de plusieurs dizaines d’entretiens.

Revue de presse

- Petit papa rocker Éric Buggea Corse Hebdo 14 décembre 2018
« Smile, la symphonie inachevée des Beach Boys », l’investigation minutieuse de JM Pottier Azbinebrozer Addict Culture 29 novembre 2018
- Beach Boys, dernières pages à la plage François Gorin Télérama // Pop secrète 21 août 2018
- Smile, La symphonie inachevée des Beach Boys ! Sophie Thomas France Bleu 28 juin 2018
- Smile, l'histoire de l'album maudit des Beach Boys Nova Club Nova 26 juin 2018

- Petit papa rocker

C’est l’histoire d’un mythe. Smile ou l’album qui aurait dû dépasser artistiquement le Sgt Pepper des Beatles et qui aura, en définitive, eu raison de l’état mental de Brian Wilson. Principal artisan du chef-d’œuvre Pet Sounds, considéré encore aujourd’hui comme l’un des disques les plus novateurs et les plus influents de la pop, le leader des Beach Boys a pensé son œuvre de 1967 comme une “symphonie adolescente adressée à Dieu”.
Las, son perfectionnisme mêlé à une inaccessible quête de beauté absolue, le tout sous l’influence des drogues scellent le sot d’un projet voué à l’échec. D’abord bonnes, les vibrations deviennent délétères et les autres membres du groupe assistent impuissants à la quasi mise à mort de ce qui va, pendant des décennies, devenir l’Arlésienne du rock.
Avant sa sortie officielle en 2011, Smile a circulé sous le manteau. Bien sûr, certaines des chansons qui le composaient ont trouvé une place dans d’autres albums mais le mystère autour de l’album a toujours existé et persiste suffisamment pour que Jean-Marie Pottier, ancien rédacteur en chef du magazine Slate, lui consacre un ouvrage. Comme il l’avait pour Ground Zéro, une histoire musicale du 11 Septembre, le journaliste a creusé son sujet, interrogé des dizaines de sources et vise juste lorsqu’il écrit que ”Smile nous raconte une histoire mais aussi une histoire de l’histoire du rock”. À lire en écoutant inlassablement ce trésor longtemps resté caché.

Éric Buggea
Corse Hebdo 14 décembre 2018

« Smile, la symphonie inachevée des Beach Boys », l’investigation minutieuse de JM Pottier

Le récit débute en 2004 dans une chambre d’étudiant, ce lieu où la pop renaît sans cesse, là où s’enivrent tous les rêves pop d’un monde d’extase. Jean-Marie Pottier, futur auteur de Smile, la symphonie inachevée des Beach Boys a affiché au mur une drôle de petite annonce à propos d’un objet perdu 37 ans auparavant en 1967, Smile, un des albums les plus attendus de l’histoire du rock, des Beach Boys et dont Brian Wilson vient enfin d’enregistrer une nouvelle version… Jusqu’à ce qu’en 2011, Capitol ne propose enfin, à partir des sessions originales, une version intitulée The Smile sessions.

37 ans de rêves, de mythes qui enflent plus les années passent. L’album qui aurait pu supplanter Sgt Pepper dans la compétition entre les Beatles et les Beach Boys ?… Une œuvre inachevée forcément parfaite, celle que les fans refont sur leur lecteur de cassette, avec leur logiciel de son, dans leur chambre, et surtout dans leur tête ?!… En interview sur Addict-Culture, l’auteur nous rappelle, à une période où toute musique est devenue téléchargeable, comment l’œuvre inaccessible est celle qui sauve le désir ! 37 ans pour écrire aussi le roman de l’artiste maudit, le génie oui, mais forcément victime de toutes les malédictions, des odieux complots des plus proches, avec dans les rôles principaux, l’affreux cousin réac du groupe, Mike Love, son psychiatre Eugene Landy, plus vénal qu’analyste…

Face à tous ces récits, le remarquable travail d’investigation de J.M. Pottier n’est-il pas inévitablement source de certaines désillusions pour le fan de l’album, bercé par tant de rêves ? La légende parfois trop belle, parfaite, peut avoir à céder sa part d’imaginaire et affronter la réalité. Après avoir tant vibré à cette « Symphonie adolescente à Dieu », yeux clos vers le ciel, serait venu avec cet ouvrage, le moment de reprendre pieds sur terre, pour estimer la réputation d’un flamboyant vaisseau coulé en rade ! Pour tous, et notamment les plus jeunes amateurs de rock, l’ouvrage offre alors l’opportunité d’une immersion dans la splendeur, mais aussi la fragilité, la détresse parfois, du « classic rock » depuis les années 60…

La petite annonce affichée dans la chambre, toute virtuelle, répond au jeune Bill Earl, fan des Beach Boys, parti s’enquérir en 1967 de la sortie toujours repoussée de l’album auprès de leur maison de disque Capitol. En vain, et qui consigne dans sa chambre, sur son journal intime, sa déception, ses espoirs… Avant de mener sa propre quête pour atteindre l’album…

Car il ne s’agit pas de n’importe quel album. Le récit de Jean-Marie Pottier remonte alors le temps. L’ouvrage aborde d’abord les prémices de l’album, depuis les semaines déjà démesurées d’enregistrement du single Good Vibrations, jusqu’au long mois en studio qui mèneront Brian Wilson à perdre pied.

Nous sommes en 1966–1967 à un moment clé où la pop, après avoir généré un engouement juvénile mondial, semble vouloir s’inscrire comme un phénomène culturel majeur. Les deux plus grands groupes du moment s’affrontent par albums, de plus en plus ambitieux et matures. Rubber soul, Revolver pour les Beatles, Pet Sounds pour les Beach Boys. Chacun prépare sa réplique. Les premiers avec Sgt Pepper Lonely Hearts Club Band, les seconds avec Smile, déjà annoncé par un premier single divin : Good vibrations qui placent la concurrence à des hauteurs célestes. L’espoir nourri pour Smile à partir de 1966 est immense…
Sgt Pepper deviendra en 1967 un des albums majeurs de l’histoire du rock. Smile va lui disparaître de son espace-temps, la Californie de la deuxième moitié des années 60, alors phare de la culture rock, pour s’enfoncer 37 ans au purgatoire…

L’ouvrage de Jean-Marie Pottier, Smile symphonie inachevée des Beach Boys, est donc d’abord l’histoire d’un échec, le récit d’un long deuil, celui d’un album qui tarde, s’évanouit, et dont l’ombre planera ensuite sur les productions, la carrière du groupe, sur le destin fragile de son inspirateur Brian Wilson, perdu dans sa propre chambre. Brian déclarera en interview « L’idée de ce disque continuait à me tirer vers le bas ». Une blessure terrible aussi pour son jeune parolier, Van Dyke Parks, dont il se relève tout de même, dès fin 67, avec encore un album américain sophistiqué Song Cycle. Cet échec va aussi imprimer sa marque sur la carrière, et la vie, des autres membres du groupe, ses frères Dennis et Carl, son cousin Mike Love, les amis Al Jardine et Bruce Johnston…

Rien n’y fera pour Brian, pourtant très entouré par la scène culturelle californienne, raconte J.M. Pottier, « deux policiers, joués par les comédiens Dan Aykroyd et John Belushi, viennent l’arrêter pour non-pratique du surf et prononcent immédiatement la condamnation : aller prendre les vagues à Trancas Beach » ! […] Dans la poche de son maillot de bain, un petit mot manuscrit : « Je te promets que tu ne vas pas te noyer ! Tu vas vivre . »… Signé Eugène Landy, le sulfureux thérapeute… ». Vivre oui, mais dans quel état !…

C’est aussi l’histoire du déclin du plus célèbre groupe américain des sixties, qui n’a pas réussi ce nouvel album de transition vers un rock plus mature et dont la production va plonger. Le groupe a fait le deuil d’une écriture plus ambitieuse, à défaut d’une production vraiment plus actuelle…

J.M. Pottier passe en revue les multiples raisons du naufrage de Smile. « Raconter son épopée, c’est d’abord cartographier un terrible alignement des astres et désastres qui a fait dérailler un des projets les plus prometteurs de la musique pop des années soixante. » observe alors l’auteur. La carte des astres serait longue à tracer, eux qui ont nourrit tant de cosmologies…
Dans la lentille du télescope tournée vers le kaléidoscopique Smile, apparaît une conjonction de gravitations néfastes : il y a le poids des responsabilités de Brian Wilson en charge de la composition, de l’enregistrement, avec des visées très novatrices poussées jusqu’à un perfectionnisme extrême, en charge encore du lien avec un jeune parolier, Van Dike Parks, à l’écriture audacieuse. Face à des murs d’enregistrement à mixer, Brian se retrouve à devoir choisir parmi des centaines d’heures de musique. Il y a la fragilité psychologique de Brian, déjà pointée lors de son blocage en tournée, et démultipliée par l’usage de drogues. Et puis aussi son isolement au sein du groupe pour soutenir un tel projet. Il est vrai que la visée même de Smile est complexe…

J.M. Pottier, dans son interview sur Addict-Culture, revient sur ce projet « quand même assez flou. Smile, ce sont plusieurs concepts emboîtés, avec des éléments sur l’histoire de l’Amérique, mais aussi l’évocation des quatre éléments naturels et une espèce de régénération spirituelle…_». Rien que cela !… De quoi alimenter des décennies d’interprétations les plus variées, les plus barrées aussi… L’album porte des ambitions sociétales en lien avec l’atmosphère de la côte ouest. _Le Summer of love approche. On peut y lire aussi, Van Dike Parks le revendique, une ambition politique, au sens global. Il est question de retrouver l’esprit qui a animé le destin des États-Unis, et auquel les quatre cousins british dans le vent qui a balayé l’Amérique, ne connaissent rien !… « _Bon Dieu Brian, où sont passées les filles, la plage, la planche et les bagnoles, ce qui a fait notre rock’n’roll quoi ?!_» croirait-on entendre Mike Love …

Autour de cet alignement, pour J.M. Pottier qui a interviewé beaucoup de proches du groupe, la clé reste tout de même l’incapacité de Brian à prendre la décision qu’il avait alors toujours en main : fixer une deadline et sortir l’album… Brian ploie après de longs mois d’enregistrement sous la pression de l’ambition qu’il s’était fixée, sous le poids d’une terrible vibration d’antimatière, qui anéantit toutes les Good vibrations qui avaient initié son projet.
J. M. Pottier évoque le retour sur cette période de Brian, bien plus tard, sur l’album That Lucky Old Sun dans sa chanson Going Home : “_At 25, I turned out the light, Cause I couldn’t handle the glare in my tired eyes._”

« Mais si Smile est l’histoire d’une perte, il est aussi l’histoire d’une survie. ». Après la chute, il y a bien sûr les tentatives de retour de Brian, les velléités de résurgence du groupe… Mais ce que raconte une grande partie de l’ouvrage, c’est bien la tentative surprenante de survie de l’album lui-même ! Ce Smile « qui, alors même qu’il n’existait pas officiellement, a suscité tant de mots, d’images et de sons – des articles, des essais, des romans, des films et bien sûr des disques –, tellement de dialogues et de débats, bref, nourri sa légende, qu’il a semblé prendre vie, presque davantage que d’autres sortis dans le commerce ».

Cette survie, l’album la doit à la quête que mènent tous les fans, les journalistes à la recherche des traces du trésor perdu. La légende a-t-elle d’emblée pris le dessus sur la qualité du produit ? Personne ne peut le dire alors. Elle est relayée et alimentée par la diffusion éparse de morceaux de Smile, au fur et à mesure des sorties des albums suivants du groupe. Et les résurgences ont de quoi intriguer ! Quelques titres sublimes « Heroes and villains », « Surf’s up » poussant l’écriture de Brian Wilson encore plus loin. Des morceaux tout en fantaisie, avec des patchworks de musiques populaires américaines, des mixes de toutes sortes de bruitages, le tout avec l’intensité émotionnelle du petit enfant qui passe instantanément du rire aux larmes…

Après la mélancolie de Pet sounds, l’album semble avoir voulu porter autre chose que les émotions adolescentes proposées jusqu’ici. Child is father of the man… Smile semble moins témoigner de ces instantanés d’adolescents, marque déposée des Beach Boys, avec son couple de satisfactions/insatisfactions, qu’à un cycle de vie plus profond…

Les filaments épars de Smile alimentent l’énergie déployée à le retrouver. Les lacunes sonores sont bientôt comblées de mots. La légende alimente le développement de toute une presse musicale rock naissante. Le phénomène culturel rock, tout jeune, cherche à s’écrire. Il porte le désir de toute une génération. Rien de mieux pour alimenter le désir qu’une absence.

J.M. Pottier distingue alors plusieurs phases dans le développement de la presse rock. Il y a d’abord le développement des fanzines qui suivent le destin de l’album, dès 1967. Puis apparaissent les grandes institutions de la rock culture, avec des articles importants dans Rolling Stone, notamment sur les résurgences des Beach Boys, dans le New Musical Express qui traite en mode légende noire le destin tragique des héros rock depuis le début des seventies. Dont Brian…

« Smile nous raconte une histoire mais aussi une histoire de l’histoire du rock » écrit alors l’auteur. C’est ainsi que naît le projet de ce livre, construit autour de l’idée du disque qui raconte par son destin, l’histoire du rock. Le piratage, marque de fabrique de la contre-culture et du rock, poursuit le destin de Smile. Pendant 37 ans, cet album inaudible, accompagne aussi l’histoire du rock par la circulation parallèle des extraits des sessions d’époque. J.M. Pottier reconstitue avec beaucoup d’attention, les chaînons qui voient se diffuser des pans entiers d’enregistrements sous forme de vinyles ou de cassettes. Ce sont des versions de titres, de simples extraits de sessions qui circulent sous la forme de bootlegs. Chacun ayant la sensation de recevoir une part du trésor caché !

Plus encore, avec Smile, le piratage permet à ces fans de devenir créateurs participant à l’œuvre Smile ! Pour peu que l’auditeur ait récupéré suffisamment d’extraits parmi la myriade qui circule, il peut alors sélectionner les titres, mais aussi les versions qu’il souhaite, puis les compiler dans l’ordre qui lui sied ! Pour J.M. Pottier, « Smile devient une œuvre dont vous êtes le héros » ! Avec l’arrivée du numérique la diffusion d’éclats de Smile s’accélère, et les potentialités de montage. Avec un simple logiciel de son, le fan ne se contente plus de regrouper des morceaux de différentes sessions, il peut assembler pour un même morceau des pistes de sessions différentes. L’œuvre divergente qui nourrissait l’esprit de Brian en 1967 jusqu’à l’anéantir, est ainsi reproduite dans les centaines de versions de Smile qui circulent sur les réseaux…

A chacun son Smile ! La contre–culture rock, dans l’esprit du Web 2.0, atteint avec Smile, un stade assez révolutionnaire dans le rapport production/consommation esthétique ! L’œuvre est coproduite par l’artiste et les auditeurs !… Au point qu’en 2004, lors des sorties de la version réenregistrée par Brian lui-même, qui choisit un ordre de titres adapté à une tournée en live, puis de Smile Sessions en 2011, avec le même ordre, à partir d’enregistrements d’époque, ces versions n’ont droit à aucun surcroît de légitimité pour certains auditeurs, bercés par leur propres versions de l’œuvre… Brian peut-il encore s’arroger ce qu’il a esquissé 37 ans auparavant ? Très affecté, est-il encore en état ?… Qui défend alors le « vrai » Brian Wilson ?

L’ouvrage de J.M. Pottier n’est donc pas un livre à thèse, qui apporterait sur des choses si peu tangibles, un point de vue définitif. L’auteur ouvre toutes les questions posées par l’album. Plus nous progressons dans la lecture, plus nous avons le sentiment d’avancer dans un monde démultiplié qui donne un peu le tournis. On croit avec ce livre, avoir enfin le droit d’apercevoir la carte du trésor caché ? On croit entendre enfin le vrai Smile ? Au final, nous accédons à beaucoup de choses mais pas à tant de certitudes que cela. Le Smile de 1967, inachevé, est inaccessible, mais pour notre bonheur chacun peut révéler son propre Smile !
N’avons-nous pas tout de même deux sorties officielles ? Oui et c’est déjà une de trop ! Certains fans s’opposent même à l’idée qu’un album officiel ait pu sortir, estimant soit qu’il ne puisse plus y en avoir, soit que le trésor n’ait jamais été qu’un leurre !…

Au fil de l’investigation remarquable de l’auteur, nous avons plongé pour le meilleur et le pire dans l’univers de la culture rock, côte ouest américaine. A partir d’une documentation très ancrée, nous avons mis en lien tant de moment de vie, de tractations, de phénomènes culturels… Nous avons été régulièrement bousculés dans nos représentations, dans nos passions, pour notre héros bien sûr, mais aussi sur la réalité d’une telle merveille. Ma lecture de cet ouvrage, la rencontre en interview de J.M. Pottier, m’auront personnellement permis de mieux prendre en compte la multiplicité de Smile, objet vénéré mais définitivement un peu plus flou que prévu… Sans que cela n’entame l’immense émotion éprouvée à chaque écoute.

Que penser alors d’une telle « auberge espagnole » ? Une œuvre reconstruite, interprétée par chacun, de par ses thèmes multiples et enchâssés, avec tant de perspectives… En fin d’ouvrage, Jean-Marie Pottier revient sur les textes, quasi achevés en 1967, sur « l’objectivité » de Smile. L’auteur a écrit plusieurs livres sur la musique, aux Éditions Le Mot Et Le Reste, notamment Ground Zero, une histoire musicale du 11 Septembre . Il y traite des effets de l’évènement sur la production musicale qui suit. Et puis Indie pop – 1979–1997 , où il aborde aussi le positionnement économique et l’impact politique de l’indie pop.

Les ouvrages de J.M. Pottier ancrent donc toujours la musique dans son contexte culturel, commercial, politique. Dans son dernier chapitre, l’auteur s’efforce de décrypter l’écriture très allusive et surréaliste de Van Dike Parks… Il s’appuie pour cela sur les déclarations en interview du parolier qui, dans une formule, fait référence à Dylan : « I was a son of the american revolution, and there was blood on the tracks ». Smile est alors l’histoire de cette piste américaine sanglante, celle de « toutes les guerres américaines gagnées ou perdues, passées ou en cours, à l’extérieur comme à l’intérieur ». Le Viêt-Nam gronde. « Brian Wilson et Van Dike Parks veulent défendre le rêve américain, mais aussi décrire les fractures américaines ». Cela passe par un travail sur les mythes fondateurs, la culture américaine, ses chants populaires qui irriguent l’album sous une forme ou une autre.
Toujours précautionneux, l’auteur s’appuie sur l’étude universitaire pointilliste des textes de Smile, proposée par Dale Carter, qui éclaire les incessantes allusions et la thématique des textes. L’analyse de certains titres ne se donne pas d’emblée et J.M. Pottier éclaire l’articulation entre texte et citations musicales.

On comprend alors peut-être mieux, la logique émotionnelle étonnante de Smile, ces fameuses sautes d’humeurs, qu’on peut attribuer au psychédélisme ambiant, à une écriture collagiste en vogue, à la prise de substance qui déstabilise, mais aussi au projet très ambitieux : aborder le destin d’un pays ! Côté textes, l’écriture de Van Dike Parks, très allusive, reste finalement à distance. Côté musique, Brian Wilson semble s’être investi à propos du destin de son pays, avec une empathie totale… Une empathie immense qui cherche à prendre en compte à tout moment les contradictions, les tensions d’un pays, les forces qui s’opposent. Cow-boys et indiens…
On distingue peut-être alors mieux en Smile, sa force inouïe et sa fragilité inhérente. Cette force, presque transcendante à l’écoute, qui va réussir à survivre malgré l’échec. Cette fragilité émotionnelle à vouloir prendre en compte simultanément toutes les contradictions, tous les Heroes and Villains…

Dans ce livre remarquable, l’investigation minutieuse, patiente de J.M. Pottier n’aura imposé aucune thèse. Elle nous aura accompagnés sur les chemins sinueux où Smile a semblé se perdre puis reprendre vie. L’ouvrage rejoint alors, discrètement, l’esprit de l’album, résolument ouvert, à toutes les contradictions. Finalement passionné !

Lire la chronique sur le site de Addict Culture

Azbinebrozer
Addict Culture 29 novembre 2018

- Beach Boys, dernières pages à la plage

François Gorin continue l’histoire des Disques rayés sur son nouveau blog, Pop secrète.

Le plus emblématique des groupes californiens, et son créateur génial Brian Wilson, occupent-ils la place qu’ils méritent au panthéon de la pop ? Deux livres en français dans le texte viennent relancer le débat – une biographie et une étude détaillée du “cas” Smile, fameux album maudit qui faillit avoir la peau dudit Brian.

Les Beach Boys ne sont pas seulement les inventeurs présumés du yacht rock. Ils sont aussi et à jamais l’archétype du groupe-qui-n’est-pas-celui-que-vous-croyez. La faute aux chemisettes rayées, aux planches à surf, aux bagnoles trafiquées et aux blondes californiennes. Ces fétiches ont à la fois assuré la promotion des frères Wilson & co, tout en recouvrant, comme les couleurs vives d’un vilain chromo, le talent de compositeur du plus doué d’entre eux, Brian. Il y a ceux qui savent et ceux qui s’en foutent. La proportion des premiers a semble-t-il augmenté avec les années. Mais chez les plus fervents fans continue de sévir un complexe. Les Beach Boys, et Brian Wilson au premier chef, n’auraient toujours pas le rang qu’ils méritent. Il faut y remédier, a dû penser Jean-Emmanuel Deluxe au moment d’entamer sa biographie à la fois sommaire et pointilleuse.

Ours savant et G.O. en casquette

Beach Boys – un été sans fin (éd. Atlantica), sous une jaquette qui pérennise le cliché surf, est porté par l’enthousiasme de son auteur, qui a lu tous les bons livres et obtenu quelques interviews en prime. S’il pointe l’ingratitude de la critique, surtout française, à l’égard de ses favoris, il n’hésite pas à user lui-même des charmes de celle-ci (emportements, approximations, saillies parfois drôles…). Je peux témoigner qu’en 1980, lors de leur passage au Palais des Sports, il n’était pas facile de défendre les Beach Boys. Tandis qu’autour de moi des couples en tenues colorées dansaient le rock sur les vieux tubes rémoulés par ce juke-box humain qu’était devenu le groupe, avec Mike Love en G.O. à casquette, je voyais ce pauvre Brian, en surpoids et barbu, attelé à un piano dont aucun son ne sortait. On le faisait applaudir en lui levant le bras, tel un ours savant qui ne savait plus où il habitait – pas sur scène en tout cas.

Cinq ans après, je rédigeai pour Rock & Folk un long article intitulé La Dernière Plage. J’y parlais naturellement de Smile, le fameux album fantôme inachevé dont la légende courait depuis un moment. Quelque temps plus tard, un camarade éclairé (Philippe Auclair pour ne pas le nommer, qui fréquentait Andy Paley), me remit une cassette contenant des extraits inédits de Smile. Les plus flippants, notamment un thème obsédant de cinq notes au clavecin (pris dans la mélodie à tiroirs de Heroes and Villains), et les sirènes de Fire, un morceau dont le pouvoir méphitique avait, dit-on, mis le feu à l’immeuble voisin du studio. C’était comme si, en 1966, on avait commandé en même temps à Brian Wilson la BO d’un film d’horreur et celle d’un Disney. Le cartoon bucolique, c’était Smiley Smile, aimable ersatz sorti par Capitol en 1967. L’autre était sur la cassette, parmi des choses plus faciles mais qui montraient assez clairement que le génie de Brian Wilson était à double face.

Reconnaissance infinie et malaise

L’histoire de Smile est narrée par le détail, c’est peu de le dire, dans un livre de Jean-Marie Pottier (éd. Le Mot et le Reste). Trente ans se sont écoulés depuis la cassette et comme tout amateur des Beach Boys, je me suis procuré tour à tour un CD pirate reconstituant l’album, la version 2004 orchestrée par les Wondermints autour de Brian et enfin le coffret sorti en 2011 pour épuiser le sujet. Je précise que ce dernier m’a été envoyé par la maison de disque. Aurais-je cassé ma tirelire pour écouter un CD entier de prises de Heroes and Villains, parmi la somme de bandes originales contenues dans cet objet de la taille d’un meuble ? Certains l’ont fait, j’en connais. J’ai aussi assisté, à Londres, en février 2004, au concert où Brian Wilson présentait Smile, à moins que ce ne fût les Wondermints qui présentaient Brian Wilson, démarche hésitante et voix usée, comme un oncle enfin sorti du coma.

[…]

Lire le billet sur le blog de François Gorin

François Gorin
Télérama // Pop secrète 21 août 2018

- Smile, La symphonie inachevée des Beach Boys !

En 1966, le leader des Beach Boys Brian Wilson, qui vient de révolutionner la pop avec le single « Good Vibrations », fantasme Smile, une « symphonie adolescente adressée à Dieu », une saga mêlant l’histoire de l’Amérique à l’exploration du cycle de la vie et des éléments.

Drogues, rivalités, Smile est mort, vive Smile ! Il a fasciné, est devenu un véritable trésor, avant de finir par sortir en 2011 !

Jean Marie Pottier nous raconte l’histoire de cet album dans ce livre, aux éditions ”Le Mot et le Reste”, un livre idéal pour les vacances !

Pour écouter l’émission Coup de coeur sur les ondes de radio Nova en podcast, cliquez ici

Sophie Thomas
France Bleu 28 juin 2018

- Smile, l'histoire de l'album maudit des Beach Boys

Le Nova Club t’en parle avec Jean-Marie Pottier qui vient de publier « Smile, l’histoire de l’album maudit des Beach Boys ».

Aujourd’hui le Nova Club reçoit le journaliste Jean-Marie Pottier. David Blot et Sophie Marchand vont évidemment parler musique avec lui et plus particulièrement des Beach Boys puisqu’il vient de sortir La symphonie inachevée des Beach Boys. Un livre dans lequel il retrace l’histoire de l’album Smile qui devait sortir en 1967 et qui n’a finalement jamais vu le jour. Et bien sûr on va écouter le groupe californien mais aussi Johan Papaconstantino, Disiz la Peste et Jay Rock.

Pour écouter cette émission en podcast, cliquez ici

Nova Club
Nova 26 juin 2018
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