Parution : 19/03/2010
ISBN : 9782360540143
306 pages (14,8 x 21 cm)

24.00 €

Les Années Actuel

Contestations rigolardes et aventures modernes

L’ouvrage est agrémenté, au fil du texte, de nombreuses illustrations de couvertures de magazines, et accompagné d’un livret couleur de 24 pages. Ces documents permettent au lecteur de prendre la mesure de l’héritage visuel et graphique laissé par Actuel.

Kevin Mellet – Revue Réseaux

Illustré – Cahier quadri

Lieu de contre-culture emblématique des années soixante-dix, Actuel reste ignoré par l’histoire en général et celle de la presse en particulier. Le confinement marginal de ce magazine masque l’entreprise collective qui donne une visibilité inédite aux mouvements sociaux s’épanouissant dans la France pompidolienne, ce qui en fait un « lieu de mémoire d’une certaine idée de la culture.
Jean-François Bizot, riche héritier, mécène dans l’âme et mao repenti, a eu sa révélation aux États-Unis. Il y rencontre la freak culture et la free press, qui vont le conforter dans son désir de faire un journal.
Ce livre, construit autour des témoignages de ses collaborateurs, est l’écho de cette aventure collective. Il dessine le portrait d’une jeunesse bourgeoise, cultivée, imprégnée de la guerre d’Algérie, de l’héritage sartrien, de la décolonisation et des grandes aventures de la presse d’après-guerre. Ce collectif donne naissance au journal Actuel et ses suites que sont le deuxième Actuel et Radio Nova, et va surtout créer un style qui imprègne aujourd’hui encore le paysage médiatique et audiovisuel français.

Revue de presse

- Les Années Actuel Kevin Mellet revue RESEAUX n°172 Printemps 2012
- Une époque Actuelle Kalcha Be Rock Juin 2010
- La saga ultra-complète de l'odyssée de cet extraordinaire magazine Jean Dominique Bernard Suite 101 Mai 2010
- Les décennies aventureuses Patrick Scarzello Sud ouest 9 mai 2010

- Les Années Actuel

Les années Actuel dresse le portrait de Jean-François Bizot, patron de presse, figure mythique de la contre-culture, personnage charismatique, disparu en
2007, à travers l’histoire de ses entreprises de presse : le magazine Actuel et Radio Nova. Les auteurs, Perrine Kervran et Anaïs Kien, sont historiennes et
documentaristes. Le livre prolonge et enrichit une série de quatre documentaires sonores diffusés début 2008 dans l’émission La Fabrique de l’Histoire, sur
France Culture. L’ouvrage donne la part belle aux témoignages de ceux qui ont participé aux aventures d’Actuel et de Radio Nova, la « bande à Bizot ». *Le
matériau est restitué de manière brute, les extraits d’entretiens occupant près de la moitié du texte.* *L’ouvrage est agrémenté, au fil du texte, de nombreuses
illustrations de couvertures de magazines, et accompagné d’un livret couleur de 24 pages. Ces documents permettent au lecteur de prendre la mesure de
l’héritage visuel et graphique laissé par Actuel. Il convient ici de saluer un travail éditorial remarquable.*
Le plan du livre suit une trame historique, décrivant successivement les trois grandes réalisations de J.-F. Bizot : le journal Actuel (1970–1975), la deuxième
version d’Actuel (1979–1994) et Radio Nova (créée en 1981). Il donne à voir un récit qui – si l’on exclut la narration héroïque qu’en ont fait ses protago-
nistes et le souvenir vif qu’en gardent lecteurs et auditeurs – occupe une place mineure comme objet pour l’histoire et les sciences sociales. Les années
Actuel élève les entreprises de J.-F. Bizot, et pas seulement le premier Actuel, souvent réduit au statut de « bible » du mouvement hippie français, au rang
d’objet de recherche légitime… et contribue à l’éclairer selon deux perspectives : histoire de la presse et des médias et histoire culturelle française.
Tout commence par un voyage aux États-Unis en 1969. J.-F. Bizot, jeune journaliste à L’Express, y découvre simultanément la contre-culture américaine et
la presse underground. Cette dernière traite de sujets liés à la drogue, à la libération sexuelle, aux communautés, au rock, à l’écologie, dans un style mêlant
humour, récit subjectif et ironie, le tout sur fond de graphismes colorés et psychédéliques. En créant Actuel, Bizot se donne pour mission de diffuser et
populariser l’underground en France. Il s’agit d’innover dans la forme et sur le fond pour s’extirper de la rhétorique militante d’extrême-gauche, dominante
alors dans la presse alternative – creuset dont sont issus plusieurs membres de la bande à Bizot – et promouvoir une contestation créative et rigolarde.
Actuel adhère au mouvement free press, ce qui lui permet de compléter son contenu éditorial en s’approvisionnant gratuitement auprès des grands frères
américains : bande dessinée (Gilbert Shelton, Crumb), reportages gonzo (dans le style de Hunter S. Thompson), etc. C’est aussi un magazine participatif, qui
donne la part belle au courrier des lecteurs et aux petites annonces, qui fera de son n° 5 un « numéro spécial réalisé par les lecteurs », et qui constituera
un réseau de correspondants chargés de cartographier, partout en France, les lieux de l’underground. L’aventure du premier Actuel s’arrête en 1975. Pour
autant, la bande ne se dissout pas ; on vit ensemble (dans un hôtel particulier de banlieue, racheté par Bizot), on voyage ensemble, et on se remet au travail
ensemble pour réaliser des almanachs (« Almanach des années 1980 : nouveau et intéressant »).
Le deuxième Actuel, magazine de grands reportages qui sera diffusé jusqu’à 400 000 exemplaires, marque l’entrée dans l’âge adulte et la volonté de réussir de J.-F. Bizot et de sa bande. Là où le premier Actuel s’était construit sur la promotion des utopies concrètes de l’underground et s’achève sur leurs décombres, le second prend pour mot d’ordre la modernité. Les sujets, la musique – défendue par Actuel et diffusée sur Radio Nova : la new wave, l’afrobeat –, la maquette et la photographie : Actuel sera moderne. Les rubriques s’ouvrent à la science et à la technologie, à l’argent et à la réussite personnelle. Mais le second Actuel, qui se voit comme un Paris Match de gauche, est avant tout un magazine de grands reportages, de photographies et de récits. L’humour et le style subjectif, caractéristiques du nouveau journalisme et du premier Actuel, sont toujours présents, mais les modèles sont Joseph Kessel, Albert Londres.
Les journalistes d’Actuel parcourent le monde, l’Afrique en particulier. Le deuxième Actuel incarne les années 1980 ; les ventes finissent par s’essouffler
et la formule tourne en rond. Si Actuel s’arrête en 1994, l’« esprit Actuel » irradie le monde médiatique, de la presse (des Inrockuptibles à Technikart) à
la télévision (à Canal +, surtout) en passant par la radio. Dernière grande entreprise médiatique de J.-F. Bizot, Radio Nova – mais il
faudrait aussi citer Novamag, côté presse, et TSF, côté radio – est née en 1981, au moment de la libération des ondes, de la rencontre d’Actuel et de dissidents
de Radio France et de son Atelier de Création Radiophonique. Au départ, l’approche est expérimentale ; l’objectif est de rompre avec les formats radiophoniques traditionnels, de créer une ambiance et un style à partir de collages de sons, d’enregistrements réalisés en extérieur, d’archives, de musique.
De ses débuts, Radio Nova gardera une identité sonore forte, immédiatement reconnaissable. Par ailleurs, la radio accompagnera de nombreux courants musicaux. De la new wave des débuts (« froide comme les années 1980 ») au rap et à la techno, en passant par la world music, Radio Nova définira les canons de l’éclectisme musical, derrière la bannière « la sono mondiale ».
Bizot occupe donc une place singulière dans l’histoire de la presse et des médias. Héritier, il investit son argent dans des entreprises de presse originales, et ne
cesse d’innover dans la forme comme sur le fond. L’ouvrage et les témoignages font bien ressortir la geste bizotienne : un esprit collectif fort (la « bande »),
l’engagement par l’exploration des marges, la recherche de style, mais aussi une exigence journalistique extrême. En effet, la bande à Bizot, ce ne sont pas
des acteurs de l’underground, pas des routards, mais des « vrais » journalistes, durs à la tâche (« c’était une usine, Actuel », Léon Mercadet, p. 58).
Il est tentant de lire en filigrane, à travers les aventures journalistiques de Bizot, un condensé de l’Histoire culturelle française de l’après-1968. L’ouvrage
montre que ses entreprises ont exercé, et continuent d’exercer une influence très forte dans les médias, dans la culture, dans les mœurs : « c’est finalement
d’histoire d’un homme et de sa bande qui ne cessent de s’adapter à l’air du temps, quitte à le créer quand ils ne parviennent pas à le saisir » (p. 267). De
ce point de vue, l’ouvrage de P. Kervran et A. Kien laisse la place ouverte à des interprétations diverses, potentiellement contradictoires. On s’y essaiera
brièvement, au risque de caricaturer l’ouvrage et les intentions de ses auteurs.
Une première lecture, inspirée de Boltanski et Chiapello, verra dans le parcours de Bizot, une personnification de l’évolution de l’esprit du capitalisme.
Alors que 1968 marque un moment de convergence et d’association de la critique sociale et de la critique artiste, le premier Actuel cherche, par le style,
par la musique, par le psychédélisme à autonomiser la critique artiste de la critique sociale… tout en maintenant un horizon d’émancipation et un intérêt
pour les aventures collectives (communautés, écologie, etc.). Le deuxième Actuel marquera, selon cette perspective, la conversion des « nouvelles élites
acquises à la critique artiste », au capitalisme et l’émergence du nouvel esprit du capitalisme (avec les rubriques « techno », « business », « coup de fric »).
Face à cette première lecture, quelque peu réductrice, on opposera une lecture latourienne des aventures de Bizot et de sa bande. L’agency qu’ils forment
ensemble ressemble à s’y méprendre à un laboratoire, tour à tour porte-parole, traducteur et producteur de collectifs. Que font ces journalistes, si ce n’est
récolter des éléments hétérogènes, les assembler, et ainsi créer des formes qui à leur tour produisent de nouvelles connexions ? Bizot et ses comparses n’ont
cessé de chercher et d’innover tout au long de leur carrière. Comme Bizot le dira lui-même dans le dernier numéro d’Actuel : « Il est 2000 moins cinq,
excusez-moi, on est pressé d’inventer la suite » (p. 218).

RESEAUX

Kevin Mellet
revue RESEAUX n°172 Printemps 2012

- Une époque Actuelle
Notre époque – ou en tout cas ce que nous en reflètent ses médias- est devenue bien aseptisée. C’est le premier constat que l’on peut dresser après lecture de cet excellent ouvrage qui revient sur l’aventure pleine de rebondissement de la revue Actuel. Les auteurs, toutes deux historiennes, interrogent les différents acteurs de l’époque et remettent en contexte leurs témoignages pour expliquer comment une bande de jeunes petits bourgeois plutôt bien éduqués (beaucoup sortent de Science-Po), déçus par les idées gauchistes et le militantisme, vont devenir la représentation ultime de l’Underground en France. Depuis les débuts psychédéliques du magazine en 1970, en passant par sa renaissance new wave des années 80, jusqu’au passage de relai à la sono mondiale de Radio Nova aujourd’hui, l’équipe menée par le regretté Jean-François Bizot aura su être la caisse de résonnance de toute une génération avide de nouvelles sensations, quand elle ne créait pas elle-même les tendances du lendemain. Le livre évite toutefois l’hagiographie trop complaisante et souligne souvent les nombreux paradoxes de Actuel (ex. faire l’éloge de la paresse en travaillant 16h par jour, raconter les bienfaits de la Route sans bouger de son bureau parisien…). Ces 268 pages montrent néanmoins comment Jean-François Bizot, riche héritier un brin manipulateur, détecteur de talents hors-pair et amateur de paris insensés, aura totalement transformé la paysage culturel français en l’espace de quatre décennies. Qui prendra la relève?
Kalcha
Be Rock Juin 2010

- La saga ultra-complète de l'odyssée de cet extraordinaire magazine

(...)

Perrine Kervran et Anaïs Kien journalistes à France Culture (elles travaillent, entre autres avec l’équipe de La Fabrique de l’Histoire) ont fait un travail d’historiennes, colossal. Interviewant tous les collaborateurs de Bizot, ceux qui ont vécus les différentes époques/périodes de cette aventure collective, elles signent un livre bougrement intéressant qui nous replonge, le temps de sa lecture (et même après) au cœur de notre jeunesse…Car loin d’être passéiste, ce livre nous rappelle surtout que ce genre de magazine (Actuel), ce genre de personnage extraordinaire (Bizot) font cruellement défaut… actuel-lement…

Suite 101.fr

Jean Dominique Bernard
Suite 101 Mai 2010

- Les décennies aventureuses
Les décennies aventureuses
Patrick Scarzello
Sud ouest 9 mai 2010
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