Parution : 13/11/2014
ISBN : 9782360541683
128 pages (14,8 x 21)

10.00 €

(le peuple des bords)

Une sédimentation d’images sans image

Je gratte de mes ongles courts les couches supérieures du béton, tente d’y trouver une vérité qui serait antérieure, quelque chose de caché, de dissimulé. De la poudre colorée sous mes ongles qui se cassent. Dans l’idée de retrouver une origine, que ce soit celle de la couleur, ou de la matière. Mais aussi de traverser la surface des choses et d’éprouver leur texture. Une histoire se raconte ainsi, celle de gestes superposés, de motifs agencés, de formes et de mots : un récit texturé dans la pierre ou le béton, dans la poussière sous mes ongles.

(le peuple des bords) est le titre d’un récit fictionnel s’appuyant sur le projet hétérotopique d’un exposition. Une sédimentation d’images sans image est le titre d’une exposition qui réunit sept artistes dont les œuvres participent à une fiction permettant d’occuper une ou des zones d’étrangeté poétique, territoriale, architecturale, paysagère, entropique. Ils invitent à chercher les ruptures de linéarité dans l’histoire, ils inventent des espaces autres. L’ensemble – ce livre – se propose de renouveler le discours critique en instituant une mise en regard des œuvres et de la fiction sans surplomb, à même les choses, jouant d’une jonction-disjonction entre texte et œuvres.

Le lien vers l’exposition à la galerie des grands bains douches de la Plaine à Marseille

Revue de presse

- (le peuple des bords) Colette Tron cahier critique de poésie 12 janvier 2016
- Où sont passées les fortifications Cannibale Claro Le Clavier Cannibale 24 février 2015

- (le peuple des bords)

Relié, peut-être par les bords, à une exposition collective à la galerie Art-Cade à Marseille, elle-même explorant les hétérotopies, propres au concept de Michel Foucault, c’est certainement à l’expérience de juxtaposition que se livre ici Sally Bonn, docteur en esthétique, et dont elle décrit ainsi l’objet : « L’ensemble – ce livre – se propose de renouveler le discours critique en instituant une mise en regard des œuvres et de la fiction. » Car il y a récit plus que théorie, et l’essai critique est bien celui des écarts et de la compensation entre texte et œuvres, et de la distance critique (ce que Roland Barthes appelait la délicatesse) de l’œuvre au texte (pour citer Barthes à nouveau). Et ouvrir l’esthétique, comme discipline, mais aussi en tant qu’expérience sensible, c’est « ouvrir la langue, l’écarter, éloigner les noms », écrit Sally Bonn. Et alors, « quelque chose s’est ouvert dans l’appréhension du savoir, celle de l’écriture, celle de l’appropriation ». Et tandis que la fiction arpente des espaces, au propre et au figuré, déambulation en zones indéfinies, le livre offre à appréhender, de même, les œuvres des artistes de l’exposition par une série d’excellentes photographies – dont nous ne trouvons titre et référence qu’à la fin. L’expérience est probante. Et je me sens être du « peuple des bords ».

Retrouver la chronique sur le site de CCP

Colette Tron
cahier critique de poésie 12 janvier 2016

- Où sont passées les fortifications

Il était une fois une exposition, ou plutôt une « sédimentation d’images sans image », c’était à la fin de l’an dernier, à la galerie des Grands bains douches de la Plaine à Marseille. À partir des œuvres exposées, la philosophe de l’art Sally Bonn a conçu un texte intitulé, entre parenthèses – comme s’il fallait marquer les marges, pour ainsi dire de la courbe de l’ongle – : (le peuple des bords), que publient les éditons Le Mot et le Reste.

***

Plusieurs femmes, puis une seule, marchent dans la « zone », ou plutôt l’interzone, un espace hétérotopique encore à inventer, un « espace de rejet », une « tranchée ouverte » – ne restent que les rails, qui elles-mêmes ont succédé à d’anciennes lignes de partage. L’exploration de cet espace est la matière même du texte, où le corps ambule, palpe, voit, note, s’allonge à même les textures pour mieux les éprouver, pour mieux entendre la rumeur de la ville qui piétine autour. C’est un lieu à la fois livré à l’oubli et offert à l’expérience :

« Ce n’est pas un lieu pour la flânerie, mais l’idée même de flânerie y devient possible quand le reste de la ville est pris entre la violence d’espaces urbains dévastés et abandonnés et la violence inverse d’une urbanité nettoyée et de façade. » (p. 13)

On avance donc ce texte à la façon – statique/mobile – de la récitante, qui fait de son déplacement davantage qu’une translation : occasion d’une remise en question, voire d’une création de questions autres ; expérience physique de l’environnement, qui se frôle, du sol où se larver, de la surface qu’on goûte. Lecture tactile de ce qui menace de faire décor, faute de fonction, la zone à la fois réelle et spectrale que « visite » la narratrice est celle qui manque aux villes et à la fois en constitue la marge impensée.

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Cannibale Claro
Le Clavier Cannibale 24 février 2015
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